Nous voilà rendu le 26 août, soit 23 jours plus tard que mon dernier article publié. Je me dois de vous donner de mes nouvelles après autant de temps écoulé. Si je ne l'ai pas fait c'est que j'en ai été incapable parce que ma condition physique m'a empêché de le faire. Il s'en est passé des choses depuis le dernier article et vous serez en mesure de constater que malgré mon grand désir de le faire, la douleur était trop présente et invalidante chaque jour pour vous en informer.
Mon dernier article a été publié le 3 août, et c'est à cette période que la douleur s'est accentuée au point de ne plus être en mesure de me lever, de passer de bonnes journées, la douleur contrôlait mon corps en entier. Je me souviens que dans un commentaire, mon amie Diane Morin me conseillait de me rendre à l'hôpital en ambulance afin qu'on me prenne en charge rapidement et qu'on puisse constater à quel point la douleur était violente et qu'elle contrôlait tout mon corps.
Toute la semaine qui a suivie mon dernier article (le 3 août), a été infernale. Suite à un rendez-vous avec mon médecin, il avait été décidé d'augmenter les Patchs de Fentanyl à 250 mcg/aux 2 jours plutôt qu'à 175 mcg/aux 2 jours, plus rien ne venait à bout de ma douleur et il fallait faire quelque chose.
Malgré l'augmentation des Patchs de Fentanyl, plus rien ne venait à bout de ma douleur. J'ai enduré ce calvaire du 3 août au 12 août inclusivement en hurlant de douleur à toutes les nuits dès que je me réveillais. Ces cris réveillaient mon mari qui accourait dans ma chambre pour venir voir ce dont j'avais besoin pour aider à me soulager. Les antidouleurs n'agissaient plus, ils n'étaient plus assez puissants, je lui demandais de réchauffer mon sac magique au four à micro-ondes pour que je puisse l'appliquer sur le seuil de ma douleur afin de me soulager momentanément. Il était à bout, ses nerfs lâchaient car il se sentait tellement impuissant de ne pas pouvoir m'apporter l'aide dont j'avais tant besoin.
Il a téléphoné à notre fille afin de lui demander de venir à la maison expressément pour qu'elle prenne la relève, il ne dormait plus, son anxiété et son inquiétude avaient raison de lui. Notre fille est donc arrivée le 12 août sur l'heure du dîner. Mon mari m'a demandée à plusieurs reprises les jours précédents si je voulais qu'il téléphone à l'ambulance pour qu'on vienne me chercher et m'amener à l'hôpital. Je refusais car ma crainte d'être hospitalisée avait raison de moi, je ne voulais pas que ça arrive. Lorsque ma fille est arrivée, ils ont pris la décision ensemble de faire venir l'ambulance, je n'avais plus le contrôle sur ce problème, ils le prenaient en charge. Je n'avais plus de contrôle sur mon corps, je ne pouvais même plus me lever du lit, je ne tenais plus sur mes jambes. Vouloir avancer d'un pas était infaisable lorsque je voulais me rendre à la salle de bain pour mes besoins d'hygiène, j'étais clouée au lit de douleur et je retenais mes envies d'uriner plusieurs heures parce que juste les quelques pas qui séparaient ma chambre de la salle de bain étaient trop nombreux à franchir pour que je puisse les faire.
L'ambulance est arrivée rapidement, ils m'ont pris en charge et m'ont amenée à l'hôpital au service des urgences. Mon médecin de famille était le médecin de garde aux urgences à mon arrivée à 13 heures. On m'a gardée tout l'après-midi aux urgences pour ensuite décider qu'on m'hospitalisait. Mon médecin de famille qui est médecin aux soins palliatifs est aussi spécialisé dans le contrôle de la douleur en soins palliatifs externes. Il a donc en collaboration avec le médecin qui était de garde toute la semaine à l'unité de médecine où j'étais hospitalisée élaboré un plan de soin de la douleur pour que je puisse être soulagée rapidement. Différents médicaments ont été essayés, jusqu'à ce qu'ils trouvent ceux qui me soulageaient pour que je puisse enfin être en mesure de moins souffrir et passer de meilleures nuits de sommeil. J'étais totalement dans les "vaps". J’hallucinais, je voyais des insectes sur le mur de ma chambre, ma fille et mon mari ont trouvé rigolo mon attitude de voir des insectes, des ombres sur les murs, ils savaient que les médicaments étaient puissants et que c’est ce que ça me prenait pour ne plus souffrir.
Ils ont finalement trouvé les bons médicaments pour m'empêcher de souffrir le plus possible. Le médecin qui m'a prise en charge a bien mené mon dossier. Dès le lendemain, elle m'envoyait en ambulance faire un scan thoracique, pelvien et lombaire dans un hôpital situé à 45 minutes de celui où j'étais hospitalisée, nous étions le mardi. Le mercredi un autre examen a été demandé par le médecin, une IRM dans un autre hôpital à l'extérieur à 1 heure 15 minutes de route. Ces deux hôpitaux où j'ai été amenée sont des hôpitaux que j'ai visités plusieurs fois depuis mon cancer parce qu'ils ont la technologie nécessaire pour procéder à ces examens.
Tout au cours de mon hospitalisation j'ai été prise en charge autant par la physiothérapie, le service de diététique, les infirmières et les spécialistes qui communiquaient par téléphone avec le médecin qui s'occupait de moi lors de mon hospitalisation, (radio-oncologue, radiologue, orthopédiste, etc...). Du lundi au mercredi je n'ai pas été en mesure de m'asseoir dans mon lit, je mangeais semi-allongée sur le côté, la posture assise était intolérable. J'ai reçu des grandes quantités de médicaments autant par voie buccale que par injections, on ne me laissait pas souffrir. Je dormais beaucoup, et mon mari et ma fille s'occupaient de mon bien-être émotif et médical. Lorsque les repas n'étaient pas à mon goût, ils m'apportaient un repas pour que je puisse manger et aimer ce que je mangeais.
Je ne sais trop si c'était la souffrance physique, morale, qui me rendaient si peu reconnaissante envers ma fille et mon mari, je critiquais semble t'il et ils ne savaient plus comment se comporter envers moi. Je crois que nous étions tous à bout et que nos paroles dépassaient parfois nos pensées face à cet immense stress que nous avions à faire face.
Malgré les nombreuses coupures dans le domaine de la santé, je confirme et j'affirme que lors de mon séjour à l'hôpital je n'ai aucunement manqué de soin, c'était la perfection. Je me sentais très bien entourée et en sécurité. Je suis demeurée à l'hôpital du lundi au vendredi inclusivement. Comme mes douleurs étaient bien contrôlées par la puissante médication j'ai demandé au médecin si je pouvais quitter l'hôpital car je préférais être chez moi plutôt qu'à l'hôpital. On ne se repose pas à l'hôpital, on me réveillait de nombreuses fois autant le jour que la nuit pour prendre mes signes vitaux, ma température, administrer la médication, et je voulais dormir et rattraper tout ce sommeil perdu qui m'avait rendue si épuisée.
Je n'étais plus en mesure d'uriner dès le début de mon hospitalisation. Après quelques manoeuvres médicales, mon impuissance à uriner a nécessité qu'on m'installe une sonde. J'ai conservé cette sonde jusqu'à ma sortie de l'hôpital. On l'a retirée en avant-midi, (journée de mon départ) et je n'ai eu depuis aucune difficulté à uriner dès qu'elle a été retirée. Le jeudi, la physiothérapeute est venue tester ma force musculaire, ma flexibilité afin de voir si je reprenais du mieux. Elle m'a fait me tenir debout en m'appuyant au dossier d'une chaise. Le vendredi, elle est revenue avec une "marchette" pour m'aider à faire mes premiers pas que je n'avais aucunement fait depuis le début de mon hospitalisation et les jours qui l'ont précédée. Après quelques minutes debout à me tenir à la marchette, je sentais des picotements dans mes jambes et mes pieds, je n'étais pas sûre si je parviendrais à faire un pas devant l'autre, ça m'inquiétais, je ressentais un immense poids sur mon corps, dans ma tête, le poids de l'invalidité à laquelle j'étais confrontée et j'avais très peur de ne plus être en mesure de marcher. À mon grand bonheur et à celui de toute l'équipe soignante, j'ai pu faire une longue marche en me tenant à la marchette, l'espoir était de retour.
Une équipe soignante m'a offert le mercredi un bain auquel j'ai dit Oui immédiatement. Je n'avais rien à faire, je devais me laisser prendre en charge par cette merveilleuse équipe qui m'a installée sur une surface avec laquelle on m'immergerait dans un bain hydraulique. Tout se faisait par manettes, le personnel n'avait même pas à forcer et risquer de se blesser. Ce bain a été fait dans le respect et la dignité de ma personne, ils ont été d'une grande douceur. Ils m'ont fait un shampoing et ont vu à me sécher les cheveux, à me revêtir pour la première fois depuis mon hospitalisation de mes vêtements de nuit. Je me sentais un peu mieux de porter ma jaquette que celle impersonnelle de l'hôpital.
J'ai quitté l'hôpital en après-midi le vendredi. L'hôpital s'est occupé de faxer la liste de mes médicaments à la pharmacie afin qu'on prépare mon plan de soin (médicaments) pour mon retour à la maison. Ma douleur est maintenant très bien contrôlée. Je suis beaucoup moins souffrante, mais il faut dire que mes médicaments sont très puissants et que ça me fait dormir énormément.